Chernobyl – S01E03

Épisode 3 – Open Wide, O Earth – 18/20
Le réalisme de la série est vraiment poignant et il est difficile d’en décrocher tant tout ce que l’on y voit est poignant. Ces épisodes sont de vraies réussites : certes, la fiction est là, entre les lignes, mais la réalité historique semble respectée et la série nous informe beaucoup sur la catastrophe tout en posant des questions éthiques, en creux. Bref, son succès critique est largement mérité et je ne peux que m’aligner sur tous les avis lus jusqu’ici.

> Saison 1


Spoilers

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I don’t want him to die alone.

Oui, je suis déjà de retour avec la critique du troisième épisode, mais eh, il est difficile de s’arrêter une fois qu’on est pris dans cette ambiance étouffante. Je ne suis même pas encore allé aux toilettes alors que j’en suis à un thé et deux verres d’eau, c’est vous dire. Quoi ? Comment ça on s’en fout ? Bon, d’accord, reprenons avec déjà un truc que j’aurais dû dire à l’épisode 2 : WOW, cette série sait comment faire des résumés de l’épisode précédent !

Autrement, la première scène de cet épisode est la suite directe de l’épisode 2 avec les trois volontaires qui galèrent sur leur lampe. À l’extérieur, Boris et Legasov commencent à s’inquiéter de ne pas avoir de nouvelles, sachant parfaitement que l’absence de nouvelles peut également signifier qu’ils sont déjà morts. Pourtant, ils finissent par sortir, ce qui permet d’évacuer l’eau et d’éviter la fin du monde. Ils sont applaudis pour ça ; ils sont bien braves.

Les problèmes s’enchaînent malgré tout, avec la fusion du cœur qui commence et empire les conséquences de la catastrophe. Là où la série fonctionne drôlement bien, cependant, c’est qu’elle prend le temps d’en revenir à une dimension humaine. Ainsi, Boris force Legasov à faire une marche nocturne avec lui, après ce qui semble déjà être une énième demande impulsive du professeur auprès d’un Gorbatchev excédé, histoire de parler de ce qui arrivera aux victimes de Tchernobyl.

La description des symptômes est importante pour le bien de la série, même si on les voit peu à peu dans cet épisode. Ainsi, quatre jours après l’explosion, le pompier du premier épisode n’est toujours pas mort et sa femme arrive enfin à Moscou, à l’hôpital, pour le retrouver. Elle n’a pas le droit de visite, évidemment, mais un peu d’argent aide à la faire entrer et un peu d’humanité lui permet d’apprendre dans quelle chambre se rendre. Même si on lui dit de ne pas toucher son mari, elle lui fait directement un câlin. Et on lui demande aussi si elle est enceinte, et elle dit que non, alors que j’étais persuadé que ses nausées du début de la série nous disaient qu’elle était enceinte. Bon, j’ai peut-être un peu trop imaginé les choses, mais je sens bien que c’est le cas…

Franchement, l’infirmière humaine qui la laisse entrer aurait pu l’équiper un peu plus… Là, au contraire, elle l’envoie droit au casse-pipe et la laisse passer la nuit dans un couloir. Evidemment qu’en entendant son mari se tordre de douleur, elle se précipite auprès de lui. Et il a bien les symptômes décrits par Legasov, avec la peau qui change de couleur et devenant rouge (avant d’être noire, puis de paraître en rémission alors que les organes seront en train de se décomposer).

Sa femme reste malgré tout auprès de lui et l’embrasse, parce que les médecins touchent son mari (AVEC DES GANTS) alors elle peut bien le faire elle aussi. Leur couple est beau et mignon comme tout, mais c’est super triste de la savoir condamnée comme ça ; condamnée à voir son mari mourir dans d’horribles circonstances ; condamnée à mourir elle-même ensuite. Il n’était même pas de service la nuit de l’incendie !

Elle reste donc tout l’épisode et ne fait pas cas des avertissements de l’infirmière. Plutôt que de rester trente minutes, elle reste des heures ; et elle n’a pas trop envie de rester non plus derrière le plastique comme elle le lui conseille. Lyusya, c’est son nom, est persistante. Dans tout ça, elle est aussi drôlement courageuse parce que son mari se dégrade de plus en plus, visuellement. Malgré tout, elle ne veut pas le voir mourir seul, et elle veut aussi lui annoncer… qu’elle est enceinte. Bien, j’avais vu juste là-dessus, je suis rassuré.

Pour en revenir à Boris et Legasov, leur petite marche se termine par la découverte qu’un couple les suit pour obtenir des informations – et il s’agit évidemment du KGB. La nuit est encore longue cependant, et ça permet à Legasov de retrouver Ulana qui ne parvient pas à résoudre une autre question : pourquoi le cœur a-t-il explosé ? Ma pauvre, ce n’est pas toi qui aura la réponse à une question qui fait encore débat aujourd’hui – les Russes ont même prévu d’écrire leur propre série sur l’événement en réaction à la diffusion de celle-ci, pour accuser les américains d’être responsables de la catastrophe… Quel monde !

On retrouve ensuite Ulana qui rend visite au personnel de l’usine qui travaillait le soir de la catastrophe, pour tenter de comprendre ce qu’il s’est passé. Si le chef ne parle pas, un ouvrier, Leonid, accepte de le faire. Et Ulana comprend l’horreur de la situation quand il lui révèle qu’il a 25 ans alors qu’il en paraît 80 ans à cause des radiations, du changement de couleur de sa peau et de toutes les dégradations physiques. Elle ne croit pas à sa version des événements qui n’explique pas vraiment ce qu’il s’est passé, parce qu’ils auraient suivis les protocoles. Le problème, c’est que tout le monde lui dit la même chose : ils ont tous fait correctement leur boulot.

En repartant de l’hôpital, elle aperçoit Lyusya avec son mari, et elle pète un câble contre l’infirmière de garde qui n’est pas si responsable que ça vu la masse de travail. C’est triste, mais Ulana fait trop de bruit et finit par attirer deux hommes peu ravis de ses menaces que tout le monde saura ce qu’il en est. Je me demande juste comment elle a su que Lyusya était enceinte, j’ai raté quelque chose. Ulana se fait donc arrêter par le KGB.

En parallèle, ce sont les usines de charbon qui sont réquisitionnées pour venir à bout d’un nouveau problème : les radiations risquent à présent de contaminer l’eau de la rivière approvisionnant toute la région… La scène est plutôt sympathique, avec un ministre du charbon bien mal choisi qui demande à des mineurs de se rendre à Tchernobyl pour empêcher la pollution de l’eau.

Ce que la série décrit est assez similaire à ce que les livres racontent : tous acceptent de s’y rendre sans poser trop de questions. Ils savent qu’ils sont les seuls à pouvoir empêcher une pollution de grande envergure et ça leur suffit, même s’ils risquent de mourir au passage. Les seules questions que leur chef posent à Legasov sont les questions nécessaires pour bien faire le travail, et les questions qui nous permettent peu à peu de devenir nous-mêmes experts de la catastrophe tant elles sont précises et offrent des connaissances assez claires des problèmes qui se sont posés aux scientifiques. Après, il y a forcément une part de fiction dans tout ça, mais bon, à regarder, ça paraît tout de même super fidèle.

Oh, il y a bien une rébellion des mineurs quand même, c’est quand ils comprennent qu’ils doivent creuser un tunnel sans ventilateur, alors même que la température grimpe. Les ventilateurs sont trop risqués car la poussière est pleine de radiations… Qu’à cela ne tienne, à défaut de ventilateurs, les mineurs décident de tous travailler à poil. Zéro pudeur – sauf chez certains qui gardent un sous-vêtement quand même (et du coup, ça pause la question du pourquoi, parce que comme ils sont tous nus, la pudeur devrait sauter à un moment). Le plus triste ? Boris qui reconnaît qu’il ne sait pas si les mineurs seront pris en charge après la construction du tunnel sous Tchernobyl. Ce sacrifice, c’est beau, et c’est au-delà du simple patriotisme.

On sent tout de même la gravité de la situation tout au long de l’épisode – et de la série. Gorbatchev accepte le décès de tout un tas d’hommes pour s’occuper des travaux nécessaires : déforestation, retournement du sol, construction d’un sarcophage… Beaucoup, beaucoup de main d’œuvre, beaucoup, beaucoup de décès. C’est à Legasov de l’annoncer et même lui finit par être à court de mots. Pas étonnant qu’il finisse par se suicider après tout ça.

On n’en est pas encore là toutefois : il préfère à ce stade demander la libération d’Ulana au chef du KGB. Bizarrement, celui-ci accepte si Legasov assume la responsabilité de tout ce qu’elle fera. Il la retrouve donc en cellule où elle lui explique ses découvertes : elle veut croire les deux malades qu’elle a vu dans leur respect du protocole, mais cela n’a pas de sens. De toute manière, elle ne peut plus les interroger, il est trop tard pour ça. Oui, l’épisode se conclue par l’enterrement des pompiers et des ouvriers de l’usine, tous morts suite à l’irradiation subie.

Et l’enterrement se fait dans des cercueils spéciaux et avec coulée de bitume, parce que les radiations sont encore là… C’est poignant, surtout que ça se fait dans un montage qui nous montre en parallèle les hommes réquisitionnés pour aller travailler sur le site de Tchernobyl…

Pour terminer, je dirai que dans cet épisode encore le travail de production est dingue comme tout – travail de production et de reproduction d’une époque révolue. Documents d’archives, costumes, lieux, la série fait vraiment du bon boulot pour nous replonger dans une époque douloureuse.

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